Samedi 07 octobre 2023 183e jour d’après: 05 Avril 2024
Cogito ergo sum
Nous étions entre amis l'autre soir et la discussion avait comme thème: la pensée de l'événement du 07 octobre et de ce que l'avenir réservait à nous et à l'état d'Israel. Penser est une des caractéristiques juives et tous, l'un après l'autre avons posé sur la table les ressentis, les pressentiments, parfois les certitudes assénées comme des vérités personnelles ou générales. Chacun de nous réfléchissait à haute voix. Penser pour être! Descartes nous disait Cogito ergo sum : "Je pense donc je suis" donc nous pensions et nous étions. Etions-nous là vraiment ? Etions-nous, nous même à penser ? Avions-nous des certitudes ? Devions-nous nous convaincre ou convaincre l'autre?
Freud a démenti Descartes en nous disant : "Je pense où je ne suis pas, donc je suis où je ne pense pas"
Il y avait des pensées optimistes et d'autres pessimistes! Fallait-il suivre Descartes ou Freud ?
Si Descartes a raison, chacun existe, est parce qu'il pense différemment de l'autre. Nous étions israéliens , juifs, impliqués dans l'histoire et notre conscient objectivait le monde et ce qui nous est hostile! Nous usions d'arguties, de faits historiques mêlés de-ci de-là d'émotions. Certains avancent que les émotions sont un obstacle à l'objectivité et ne doit subsister que les faits, rien que les faits.
Mais si nous suivons Freud et la psychanalyse, ce que je ferais volontiers, impossibilité est de nous détacher de nos émotions et de notre histoire. "Je pense où je ne suis pas, donc je suis où je ne pense pas" Grand humilité est de reconnaitre cette axiome: nous pensions non pas l'événement mais aussi autre chose, nous pensions en d'autres lieux ! le pogrom du 07 octobre agissait comme un miroir renvoyant à d'autres espaces psychiques personnels; nous ne pensions pas que l'événement et ses conséquences ; mais chacun à son niveau à des lieux passés mémorisés en notre inconscient individuel et familial. Non que je puisse sonder l'âme de chacun, loin de moi cette prétention et la parole de chacun nous enrichissait et nous rendait plus proche les uns des autres. Mais force est de constater que nous n'étions pas alors où nous pensions être, nous étions ailleurs où ne pensions pas être.
Et en tant que juif résonnait aussi en chacun de nous la nécessité d'être et sa pérennité malgré ou à cause des circonstances aggravantes de l'antisémitisme de par le monde et de cette hostilité envers Israel. Herbert Pagani dans son plaidoyer pour ma terre nous disait :"je pense donc je suis, ça ne veut rien dire, nous, ça fait 5000 ans qu'on pense, et nous n'existons toujours pas, je me défends, donc je suis." Herbert Pagani avait tort, cela fait près de 6000 ans que nous pensons et nous existons toujours malgré les Titus, Elisabeth ou autres Hitler. Herbert Pagani a raison nous nous défendons pour exister et nous continuons à penser avec ou sans Dieu à l'existence, à notre être sur cette terre .
Sans doute serait il plus juste de dire, je panse donc je suis, nous pansons nos plaies millénaires et nous cicatrisons. Plus ils essaient de briser nos os, plus nous formons des cals osseux qui deviennent plus solides et forts aux endroits des cassures. Cela fait 5784 ans que nous pensons, que nous pansons et que nous nous relevons plus forts. Nous pensons là où nous sommes et là où nous ne sommes pas parce que notre histoire nous habite jour et nuit et que nous pensons avec elle, pour elle. Elle nous habite, Freud a raison, nous ne sommes pas maître en notre demeure, nous sommes des éternels exilés de nous mêmes , c'est sans doute cela qui inquiète les antisémites: ce doute perpétuel que nous montrons face à leurs besoins de certitudes. Dans une interview, Michel Gad Wolfowitz parle de l'antisémitisme et de la mort symbolique du père chez les juifs, oui, nous tuons symboliquement notre père en nous recréant à chaque génération. Michel Gad Wolfowitz souligne que chaque génération de juif ne se reproduit pas "cloniquement" ni "claniquement" mais ce que "nous avons hérité de nos pères nous l'acquérons pour le posséder "( Goethe repris par Freud) c'est, pour Micha, ce qu'ils nous reprochent, et c'est pour cela que les anti-juifs nous combattent.
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